Données :
Titre : Artémis : L’esprit indomptable en chaque femme
Titre original : Artemis
Auteure : Jean Shinoda Bolen
Langue de lecture : Français
Nombre de pages : 302
Maison d’édition : Le Courrier du livre
Année de parution originale : 2014
Traduction : 2018
Public cible : Adulte
Genre : Essaie, psychologie
Histoire :
L’objectif de ce livre est, à partir d’une analyse du mythe d’Atalante et de certains traits d’Artémis, que les lecteurs puissent identifier qui ils sont. À travers cette analyse de mythe et de l’archétype d’Artémis, les lecteurs pourront, selon l’auteur, vivre une expérience spirituelle révélatrice qui les aidera dans leur épanouissement.
Critique :
À la lecture de ce livre, j’ai rapidement compris que je ne serais pas d’accord avec l’auteure. Afin de faciliter ma lecture, j’ai donc dû me dire que l’on parlerait d’un archétype et de simplement d’une analyse de ce dernier. Donc, il ne fallait pas s’y associer et comprendre Artémis et ses traits. Une fois le processus fini, j’ai repris ma lecture et immédiatement j’ai vu de gros problèmes dès l’introduction.
L’auteure n’identifie pas dès le départ ce qu’est l’archétype outre le courage, la sororité et l’esprit d’indépendance. Suite à cette petite énumération, elle donne des exemples de cet archétype qui sont présents dans la culture populaire…dont la protagoniste de Hunger Games, j’étais assez d’accord avec cet exemple, mais, ensuite, elle présente la protagoniste de Fifty Shades of Grey comme exemple de l’archétype. Pour les gens qui ne sont pas au courant, la protagoniste subit une relation extrêmement toxique et abusive. Elle devient rapidement soumise face à son partenaire Grey. Donc, disons, qu’à l’introduction, cela commençait mal ma lecture.
Mes mauvaises surprises ne s’arrêtèrent pas là. En effet, l’auteure présente les impacts négatifs du monde patriarcal et les mauvais traitements que bien des femmes vivent à travers le monde, ce qui est correct. Toutefois, elle ignore justement les relations toxiques de couple et met souvent la faute sur les deux partenaires et que la « femme » doit apprendre à identifier ses propres comportements et changer pour quitter la relation. C’était assez frustrant.
Un aspect positif, c’est qu’elle présente des vécus de plusieurs femmes qui ont subi des événements difficiles ou se sont trouvées à travers des expériences spirituelles ou qui ont survécu grâce à leur détermination. Là où cela tombe à plat, c’est lorsque l’auteure parle d’elle-même. Souvent, lorsque ces sections venaient dans le texte, je me demandais toujours : quel est le lien avec la théorie présentée avant?
Parlant des théories, quelques-unes sont pertinentes et je suivais l’auteure comme le chapitre 5 qui présente Atalante dans un monde sauvage. Toutefois, dans d’autres, l’auteure explore si peu les thèmes que je me demandais pourquoi elle parlait de ce dernier. Par exemple, il y a le chapitre 7 qui présente d’autres déesses. Dans ce chapitre, l’auteure présente brièvement d’autres déesses vierges et applique leurs qualités à elle-même ou à Artémis, elle le fait également au chapitre suivant sur les déesses lunaires. Ce qui fait que le principe de l’archétype est jeté par la fenêtre. Elle se sert d’ailleurs de ce chapitre pour dire que les femmes de l’archétype d’Athéna suivent aveuglément le patriarcat et n’ont voulu s’en sortir que grâce aux Artémis et ensuite, elle applique les qualités positives d’Athéna à elle-même. Je trouve cela un peu hypocrite. Elle idolâtre et attribue énormément de points positifs à « l’archétype d’Artémis ».
Le seul point négatif qu’elle donne à Artémis est la colère lorsqu’on lui donne pas de tribut. Ce point souligne qu’Artémis peut être aveuglée par la colère et devenir une menace, souvent psychologique, auprès de ses proches. Elle doit donc apprendre à se calmer. J’apprécie que l’on discute de la frustration qui peut être néfaste, toutefois, les exemples donnés justifient clairement le comportement. Oui, des éléments font en sorte que sa colère est mal dirigée, mais cela renforce un peu le blâme de la victime ou de la soumission ou du « bon comportement » qui doit être adopté selon les principes de l’auteure. Par contre, plus loin, elle parle de l’importance de diriger la colère pour combattre et survivre afin d’obtenir plus de droits pour les femmes.
L’auteure place énormément de contradictions, d’interprétations et de jugements dans ce livre. D’ailleurs, plusieurs de ces arguments présentant les parallèles psychologiques sont souvent interprétatifs, par exemple, elle dit que les Artémis sont proches de la nature, mais elle lie cela avec les intentions de sororité (soit de se grouper pour des causes, un esprit d’équipe avec, ici, d’autres femmes) et que les filles qui ont peur des araignées pourraient ne pas avoir cette tendance. Le lien entre la nature et la sororité ne devraient pas être mélangés, ce n’est pas parce qu’une personne a des traits d’Artémis qu’elle les a tous et qu’il y a nécessairement un lien entre deux traits.
Une autre contradiction en lien avec la sororité, est que l’auteur dit que les Artémis ont de la difficulté à établir des relations parce qu’elles ne comprennent pas les autres. Sauf que, tout le long, elle parle d’entre-aide, d’esprit de défense des plus faibles. Bref, comment l’esprit d’équipe et de sentir le besoin de défendre les plus vulnérable peut se marier au manque d’empathie qui serait tout aussi naturelle?
Toutefois, l’auteure ne cache pas les horreurs que les enfants vivent par les œuvres des autres et des adultes. C’est un point très positif qu’elle mentionne à plusieurs reprises et souligne la force que les enfants ont malgré des difficultés. Par contre, elle mentionne que des enfants Artémis ont la capacité innée de se détacher du jugement des autres. Cela m’a fâchée, c’est une capacité de survivre, cela ne veut pas dire que les enfants sont détachés, ils peuvent souffrir également. Un autre point, outre que dans les témoignages, elle a tendance à parler très négativement de la mère et plus souvent positivement du père, dont l’importance de son approbation et encouragement. Pour quelqu’un qui fait de la psychologie, je me demande si les pratiques Jung ne sont pas négatives et peuvent nuire aux gens qui vont voir les psychologues de cette pratique.
L’auteure ne cesse de faire des jugements, des liens qui sont tirés par les cheveux, elle présente des théories de mythes et des témoignages qui sont intéressants, mais ses propres témoignages, ses interprétations et ses exemples tombent à l’eau et rendent ses arguments vides de sens ou demandent l’interprétation « dans son sens ou positive » du lecteur. En plus, elle s’éloigne souvent des sujets et parfois, apporte des sections étranges avec le reste du texte. Par exemple, un moment donné, elle donne un guide pratique sur comment connecter avec son Hécate, elle ne fait pas de guide pratique tout le reste du livre!
En conclusion, j’ai bien aimé que l’auteure ne soit pas rose bonbon et qu’elle pense hors des États-Unis dans ses exemples. Je n’ai pas aimé les interprétations et l’approche péjorative des gens ne correspondant pas à ses idéaux. Le pire pour moi, c’est le manque de recherche. Il n’y a pas de sources à la fin du livre, elle assume les croyances des Premières Nations comme si c’était un acquis pour tous et, même si ce qu’elle dit par rapport aux cercles de femmes est vrai, que leur pratique est, en fait, une vénération d’Hécate. Pour moi, c’est un manque de respect. Cela manque de transparence et d’éthique. Je ne recommande donc pas ce livre, il y a sûrement des livres féministes ou spirituels qui sont beaucoup plus respectueux et englobant qui pourront vous aider dans votre parcours.
Source image :
Caroline Manière. (10 mars 2018). La Terre-Mère [acrylique sur feuille de cuivre 120x160cm]. CarolineMeurnière.com (https://carolinemaniere.com/portfolio/femme-medecine/terre-mere/ ). Image de la couverture prise sur LesLibraires : https://www.leslibraires.ca/livres/artemis-l-esprit-indomptable-en-chaque-jean-shinoda-bolen-9782702914632.html